Les chefs et les épicuriens le savent. Manger n’est pas qu’un acte qui permet uniquement de se nourrir. C’est une activité sociale, un plaisir qui permet de goûter, de sentir, de ressentir. Lorsqu’on déguste un mets, tous les sens sont en éveil : la vue, l’odorat et l’ouïe. Voilà pour le constat, somme toute assez commun, auquel tout le monde peut souscrire. Mais quand c’est l’Union centrale suisse pour le bien des aveugles (UCBA) qui l’édulcore, on ne peut que remercier les bonnes fées de ne pas souffrir d’un déficit visuel ou d’audition. « Les personnes atteintes d’un handicap visuel et auditif connaissent de nombreuses restrictions dans leur vie quotidienne.
Durant les repas, des moments qui réunissent les gens en famille, entre amis ou entre collègues, les personnes sourdaveugles sont présentes et pourtant elles se retrouvent souvent seules et isolées, et ces instants de convivialité prennent une tout autre tournur. », relève Carol Lagrange, co-directrice marketing et communication de l’UCBA.
Imaginez que vous ne voyez pas votre repas et que vous entendez vos interlocuteurs comme à travers une épaisse couche de coton. En parallèle, les bruits de vaisselle qui s’entrechoque, les fourchettes dans les assiettes et la musique de fond des haut-parleurs du bistrot se bousculent. Vous ne comprenez pas un mot, vous tâtez la nourriture avec votre fourchette… C’est ainsi que les personnes malentendantes-malvoyantes et sourdaveugles vivent une sortie au restaurant, si elles ne bénéficient pas d’un soutien spécifique.
Journée internationale
Chaque année, l’organisation faîtière du handicap visuel et de la surdicécité en Suisse organise un événement de sensibilisation autour de la journée internationale de la surdicécité qui a lieu le 27 juin. L’objectif est de sensibiliser les médias et le grand public à ce double handicap. En 2022, la journée est placée sous le slogan « A table – en situation de surdicécité » et l’UCBA invite le grand public à se mettre dans la peau d’une personne sourdaveugle le temps d’un repas.
Dans toute la Suisse, du 23 au 30 juin, les restaurants participant à cette action proposeront à leurs convives de se mettre dans la peau des sourdaveugles. Chaque client se verra proposer un set de table dans lequel des lunettes simulant une basse vision seront intégrées. Des boules Quiès seront également à disposition du public. De quoi vivre une expérience inédite face à une assiette que l’on voit à peine, le tout dans un brouillard auditif.
A Thônex et Plan-les-Ouates
A Genève, deux établissements se réjouissent de participer à cette semaine si particulière : le Cigalon à Thônex et le Café de la Place à Plan-les-Ouates. Jean-Marc Bessire et Vincenzo De Rosa, respectivement patrons du premier et du second, louent Laurent Terlinchamp, président de la Société des Cafetiers, Restaurateurs et Hôteliers de Genève, qui a relayé l’information à ses membres. « Notre rôle est de contribuer au bien-être de tous dans nos établissements », s’enthousiasment les deux cuisiniers de talent.
Manuella Magnin