A l’approche des vendanges, l’excitation culmine et on s’active dans les caves dans la zone du Mandement. Allons à la rencontre de la relève et écoutons sa passion.
Le parcours de Cédric Delacquis avait débuté dans le tertiaire. Titulaire d’une maturité professionnelle commerciale à 20 ans, il a appris les rudiments des métiers administratifs à la banque, un univers qui lui ouvrait les bras lorsqu’il travaillait en gestion de fortune. Oui, mais… il manquait à Cédric la flamme qui le motiverait à se lever chaque matin le cœur léger, celle qui lui permettrait de rêver d’un autre futur plus glorieux. Un déclic…
Qu’est-ce qui vous a fait choisir ce métier?
La magie des vendanges… cet esprit de fraternité qu’on y ressent. Pouvoir observer l’apothéose si magique du cycle de la vigne. Voir le produit passer du grain de raisin au vin. Les vendanges, c’est une énergie bouillonnante de vie et de ressentis, un florilège sensoriel. C’est une joie pour moi de passer de la grande entreprise à une ambiance fraternelle, mais aussi très terre à terre qui convient à ma nature pragmatique.
Deux mots sur votre parcours de vigneron?
A la base, je ne suis ni fils de vigneron, ni de propriétaire terrien. J’ai appris à déguster à 20 ans. Avant, je n’avais jamais bu de vin! En 2006, je suis allé déguster entre amis chez Stéphane Gros. Le personnage m’a séduit par sa simplicité et la transparence avec laquelle il opère. Il m’a transmis sa passion. J’ai découvert le secteur primaire (voire primordial), l’agriculture, l’activité pendant les vendanges. 6 mois avec Stéphane m’ont fait voir toutes les étapes. Après mon cursus d’ingénieur œnologue à l’Ecole à Changins, j’ai travaillé dans des caves dans le canton de Vaud, en Nouvelle-Zélande et en Valais pendant 4 ans. Papa depuis 2016, j’ai rejoint ma famille à Genève, avec dans mes bagages quelques 400 bouteilles vinifiées chez mon ancien employeur. Tout s’est vendu en 3 mois. En 2017, alors que je recherchais un local, Stéphane Gros a vu l’annonce et il m’a proposé une entraide. C’est ainsi que j’ai produit mes premières 2000 bouteilles (blanc, rouge, rosé), que j’ai vinifiées moi-même chez Stéphane. J’aimerais doubler la production cette année, et à moyen terme avoir mes propres locaux. Le financement participatif me semble une bonne piste pour lever des fonds pour investir et être à flot d’ici 5 ans.
Qu’est-ce vous différencie des autres vignerons?
Dans mon métier, le social a son importance. Par exemple, une rétribution du vigneron au mètre carré et non pas au kilo permettrait des prix rentables et des rémunérations plus dignes. Dans le travail des vins, je m’appuie sur le calendrier lunaire et je tente de minimiser l’impact de l’homme sur la nature. Je ne les filtre pas, non plus.
Sans terroir à revendiquer, je peux collaborer avec qui partage mon approche, m’entourer de viticulteurs qui travaillent en bio, car à terme on n’y coupera pas. J’aime l’idée de retrouver les gestes d’antan, d’avant l’avènement de l’agro-chimie.
Et puis j’aime créer des assemblages atypiques. Mon blanc Serenae 2017 marie du Chasselas vaudois, du Sauvignon blanc genevois et de la Petite Arvine valaisanne. Réunir les cépages emblématiques de ces 3 régions donne un vin intercantonal, un vin qui rassemble. Les accords diplomatiques se scellent bien devant un verre de vin! Ma vision est de valoriser et rassembler les terroirs, de rencontrer des vignerons confirmés et talentueux, comme Nicolas Bonnet.
Quel est votre vision d’avenir?
En Suisse, on fait des produits de haute facture. Ce savoir-faire caractéristique nous confère une aura internationale dont on n’a pas toujours conscience. J’aimerais exporter le vin suisse, faire découvrir nos crus ailleurs dans le monde. J’ai envie d’aller à Singapour ou à Moscou, porter la fierté de nos vins suisses, en tant que producteur local, sans forcément attendre des autres que les choses se fassent. La Genève internationale pourra certainement m’offrir des opportunités pour l’avenir.
Pamela Chiuppi
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