Légendes, mythes et désir: Café In, une exposition unique…

 

Le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem), de Marseille, inauguré en juin 2013, propose une exposition temporaire somptueuse Café In, autour du café et de son histoire. A découvrir jusqu’au 23 janvier 2017.

Puisque Léon-Paul Fargue affirme que «le café est l’institution la plus solide de France» comment expliquer que son objet soit si méconnu, et ses vertus si peu célébrées?
A travers de l’exposition Café In, de la baie à la tasse, c’est l’histoire, la géographie, l’économie, la consommation, la publicité et l’esthétique du café qui s’entremêlent dans un vaste et même univers. Le parcours de cette exposition unique s’articule autour de cinq séquences:

• Une légende de l’humanité
Plus de deux millions de tasses de café sont bues chaque jour dans le monde et la consommation mondiale augmente de 2,5% par an depuis 2011 (plus sept millions de tonnes produites en 2016). Il existe actuellement 25 millions d’exploitations de café dans le monde, mais les premières maisons de café apparaissent en 1430 à la Mecque. Une légende enracinée dans la Corne de l’Afrique permet de découvrir les premières traces de la consommation de café en Ethiopie et en Arabie, en illustrant le culte des Zar, et en révélant les vertus divinatoires de cette boisson d’abord persécutée puis sublimée par les grands hommes de l’histoire, De Bach à Bonaparte. Cette séquence propose au visiteur des textes, gravures, objets avec des interventions d’artistes contemporains comme Isabelle Vicherat et son installation vidéo «Numen».

• Une histoire de cités
Cette séquence illustre l’imaginaire anthropologique du café. De New-York, en passant par Le Caire, Venise, Marseille, Constantinople ou Cuba, le visiteur découvrira les atmosphères de terrasses de café ou d’intérieurs et d’enseignes. Ces 12 portraits de ville sont construits à partir de textes, photos, peintures, gravures et objets. Ils donnent un aperçu de la diffusion planétaire de cette boisson, des rapports que chaque ville a entretenu avec le café, jusqu’à aujourd’hui et les polémiques qu’il a suscité du 15e siècle à nos jours. 

• Goût et qualité
Où prennent racine les multiples variétés de café? Qui sont les acteurs de cette chaîne mondialisée où cohabitent planteurs, agronomes, torréfacteurs, industriels et artisans? Cette séquence nous fera voyager, sur fond de photographies réalisées par les artistes Reza, Sebastiao Salgado et Eric Bonnier, dans l’univers de la botanique, de la génétique, de l’agronomie. Imagerie agronomique, herbier monumental réalisé à partir de feuilles de robusta ou d’arabica d’origines variées, bornes aromatiques confectionnées pour l’occasion par un parfumeur délivrant l’univers sensoriel du café de la fleur au percolateur, appareils de torréfaction…Des interviews du chef étoilé Pierre Gagnaire et de baristas confirmés vous plongent dans l’univers contemporain du café où les vertus du grain sont sublimées. 

• Le marché
Il s’agira, à travers une gigantesque mappemonde conçue comme un mur vidéo de plus de 180°, animé par le studio Gobi à Marseille, de comprendre les enjeux économiques du café comme seconde production mondiale après le pétrole. 
Chiffres et statistiques révéleront simultanément la face méconnue du café. Cette quatrième séquence replace la production du café dans le jeu d’une économie mondialisée. Sa scénographie investit l’espace de l’ellipse au sein de laquelle le visiteur est en complète immersion, entouré d’écrans sur lesquels sont présentées, en temps réel, les évolutions des cours du café à Londres et New-York. En accompagnement de cette installation, des vitrines présentent des produits dérivés de cette matière première et utilisés aujourd’hui par les grands créateurs: vêtements ou de parfums, ainsi qu’un écran illustrant le marché publicitaire qui, depuis près d’un siècle, accompagne le café.

• Consommation et convivialité
Cette dernière séquence clôt l’exposition autour de la consommation du café comme pratique sociale ayant donné lieu à l’invention d’une typologie architecturale, le Café, en évolution constante au fil du temps, à l’image des fragments de mobilier du célèbre café de l’Ami Butte à Paris (1910-1930), désormais classé objet du Patrimoine, conservé par le Mucem, et qui sera reconstitué ici pour la première fois. Enfin, parce que le café est une source d’inspiration et de «vivre ensemble», cette séquence restitue autour de substantifs qui leur sont associés (se rencontrer, jouer, s’aimer, s’isoler, pérorer, converser, etc.) des chefs-d’œuvre et objets qui en caractérisent la réalité romanesque. Le café est une source d’inspiration pour de nombreux artistes. Seront ainsi convoqués des pièces de Raoul Dufy qui s’amuse des scènes de jeu, d’Albert André qui peint l’émancipation des femmes, de Sophie Calle qui parlera de rencontres amoureuses l’instant d’un café, ou de Richard Baquié. Pour l’occasion Daumier, Sempé et Geluck ont été réunis avec trois séries de dessins qui croquent les scènes qui peuvent avoir lieu dans ce théâtre de la société. Enfin, l’exposition rendra hommage à la figure du garçon de café. 

Mucem, 7 promenade Robert Laffont

Ouvert tous les jours sauf le mardi www.facebook.com/lemucem.

Nathalie Brignoli