Depuis le 12e siècle, la région de la Gruyère est connue pour sa fabrication de fromage, à travers une charte établie en 1115 par le premier comte de Gruyères. Le nom de ce fromage apparaît véritablement sous le terme « Gruière » en 1655. Sans protection commerciale, le Gruyère devient très vite la proie d’imitations, d’usages illicites et d’usurpations d’identité. Au fil du temps, il encourt aussi le risque de n’être plus qu’un nom commun et générique pour désigner un type de fromage à pâte dure. Une banalisation qui porterait un lourd préjudice à son image. Ces raisons suffisent à lancer un profond mouvement de structuration de la profession et à engager une lutte sans relâche pour l’obtention d’une appellation d’origine reconnue, apte à défendre l’identité du Gruyère sur le sol national et hors des frontières.
L’AOP, la récompense au bout du combat
Il faudra attendre le 6 juillet 2001 et autant d’efforts pour que le Gruyère bénéficie au niveau national d’une Appellation d’Origine Contrôlée (AOC). En 2011, le passage de l’AOC vers l’AOP (Appellation d’Origine Protégée) relève avant tout d’un avantage juridique, puisque l’AOP permet d’étendre le rayon de protection dans toute l’Europe et de renforcer la couverture du Gruyère AOP sur les marchés suisse et internationaux. Ces trois lettres ne sont pas un vain mot dans un monde qui se libéralise. L’AOP représente une garantie de qualité, d’authenticité, de compétitivité et de durabilité pour les producteurs et les consommateurs.
Pour Philippe Bardet, Directeur de l’Interprofession du Gruyère, « Le Gruyère AOP n’est pas un produit générique. Grâce à l’AOP, il a sa propre identité et sa propre définition. Le cahier des charges imposé par l’AOP est la colonne vertébrale de tout le travail de la filière ».
Terroir et tradition
Pour qu’un produit puisse bénéficier du signe AOP, il faut un terroir et une tradition, une histoire et une recette artisanale, ainsi que des hommes et leur précieux savoir-faire. Le Gruyère AOP est tout cela à la fois. Un fromage typique à forte identité, ancré et élaboré dans une aire géographique délimitée, depuis la production de sa matière première jusqu’à sa réalisation finale. L’AOP permet au Gruyère de protéger le nom de son produit ancestral, d’arrêter les contours de sa zone de production et de fixer les règles de fabrication dans un cahier de charges exigeant. Afin de faire fructifier un patrimoine et un savoir-faire hérités des anciens et transmis aux générations suivantes, dans les meilleures conditions.
La qualité à tous les étages
Le cahier des charges régi par l’AOP concerne les conditions de fabrication du Gruyère AOP, de l’alimentation des vaches laitières jusqu’à l’affinage des meules en cave. Ces règles, scrupuleusement respectées par les acteurs de la filière, sont garantes d’une qualité constante. Les producteurs nourrissent leurs vaches avec de l’herbe fraîche en été et du foin en hiver. L’ensilage n’est pas autorisé. Le lait cru est livré deux fois par jour et doit provenir d’un rayon de 20 kilomètres maximum de la fromagerie. L’expérience des fromagers est indispensable à chaque étape de la transformation. Suivant une recette ancestrale et des procédés traditionnels, la fabrication se réalise avec la traite du matin et du soir, dans une cuve en cuivre d’une capacité maximale de 6600 litres. Chaque meule est identifiée avec sa date de fabrication et le numéro de la fromagerie en caséine. Enfin, l’affinage en cave ou en grotte dure entre 5 et 18 mois, à une température de 12 à 18 degrés et une humidité d’environ 92%. Les meules sont disposées sur des tablards en bois d’épicéa. Elles sont régulièrement retournées et frottées à l’eau salée. Durant cette période, un contrôle de qualité est effectué par des experts qui s’assurent que tous les points requis par le cahier des charges sont remplis.
Le goût des Suisses depuis 1115
Le goût du Gruyère AOP est apprécié de tous, de l’enfant à la grand-maman. Les différents niveaux de maturité du Gruyère AOP offrent aux amateurs un large éventail d’arômes, du plus doux obtenu après 5 mois d’affinage au plus corsé, affiné pendant 12 mois ou plus en cave. Déguster le Gruyère AOP, c’est surtout se faire plaisir. Mais c’est aussi valoriser un savoir-faire traditionnel et une agriculture durable. Car le Gruyère AOP appartient à la richesse de notre patrimoine culinaire et culturel. Depuis toujours, pour toujours.
