REPORTAGE
Vous aimez votre petit noir bien serré avec une belle mousse et un fort goût de torréfaction ? Alors, passez votre chemin ! À moins que vous n’ayez envie de pénétrer dans un univers gustatif différent et envoûtant. Le café colombien est de fait à des années-lumière de l’espresso à l’italienne.
Célèbre pour son goût doux et équilibré, avec des notes florales, et fruitées, il est aromatique avec une acidité vive et un corps velouté. Cette subtile combinaison en fait l’un des cafés les plus recherchés dans le monde entier. La finca La Cabaña à San Augustin dans le département de Huila est fière de compter parmi ses prestigieux clients le fameux restaurant triplement étoilé Noma à Copenhague.
L’exploitation familiale produit bon an mal an 8-10 tonnes de café en bio. «Nous bénéficions d’un terroir idéal à plus de 1700 m d’altitude. Les arbres sont cultivés sur des cendres volcaniques, avec une température qui avoisine les 22°C et des précipitations moyennes de 1200 mm à 1850 m d’altitude. Nous cultivons plusieurs variétés, dont le Caturra, le Bourbon et le Geisha. Chaque caféier donne en environ 400 g de cerises par an, soit 280 g de café torréfié», commente Luis Alejandro Ortega en nous faisant visiter ses cultures.
Les cerises mûres sont cueillies à la main, ce qui implique plusieurs passages dans des plantations souvent escarpées. Lavées, triées, dépulpées, elles sont mises à sécher au soleil jusqu’à ce qu’elles atteignent le taux d’humidité optimal. Conditionné dans des sacs de 70 kg, le café est vendu vert pour l’exportation ou torréfié pour la consommation locale à Pitalito, à 40 minutes de San Augustin. La torréfaction dure 18 minutes jusqu’à une température de 205°C afin de faire ressortir les arômes des grains. Un processus tout en douceur, qui donne un breuvage aromatique, mais peu corsé que les plus fins palais s’arrachent, à l’instar du Geisha, qui a récemment défrayé la chronique au Panama de par son prix stratosphérique.
Grâce aux prêtres
Si la Colombie figure dans le quatuor des plus importants producteurs de café au monde, le pays ne fut pas le premier à développer cette culture, originaire d’Éthiopie, en Amérique latine.
Le café a d’abord été apporté en Colombie par des prêtres, une ou deux décennies après son arrivée dans les Amériques via les Caraïbes, dans la première moitié du XVIIe siècle. Il s’agissait probablement d’une culture maraîchère destinée à la consommation locale et au troc pendant des décennies. Le père Francisco Romero serait à l’origine de la culture commerciale du café dans le pays. L’histoire raconte qu’au début des années 1800, le père Francisco, qui entendait des confessions dans la ville de Salazar de la Palmas, dans le nord-est du pays, a demandé à ses paroissiens de planter du café en guise de pénitence pour leurs péchés. L’archevêque de Colombie en entendit parler et ordonna à tous les prêtres d’adopter cette pratique. La production commerciale de café s’est rapidement développée dans les régions où les conditions de culture étaient idéales.
Manuella Magnin