Le printemps prometteur du vin de l’Apocalypse

Né à Istanbul de parents grecs, Josef Zisyadis ne se dérobe jamais lorsqu’on évoque son passé politique en Suisse dont il reste fier. Mais aujourd’hui, alors qu’il a renoncé depuis des années à la fameuse moustache qui lui donnait un drôle de petit air de Staline, il préfère parler produits du terroir, saveurs gourmandes, cuisine naturelle et défendre bec et ongles « sa » Semaine suisse du Goût dont il est l’estimable cofondateur.

Des ceps « sur papier »
L’homme ne manque ni de charisme, ni d’énergie ! Aussi, lorsqu’il y a plus d’une décennie, il s’est mis en tête de reconstituer l’antique vignoble de Patmos – île qu’il affectionne autant que le quartier sous-gare de Lausanne où il gîte – il s’est mis à vendre des ceps de vignes « sur papier » à ses amis, relations et autres amoureux de la Grèce et du vin, afin de financer son projet. 

Épris de qualité, notre théologien à la bouche fine s’est aussi entouré d’une kyrielle de complices qui ont apporté leur savoir-faire et leur expérience pour planter, vendanger et vinifier en biodynamique : Raoul Cruchon, vigneron-œnologue à Echichens, Noé Graff, vigneron-œnologue à Begnins, Raymond Paccot, Vigneron-œnologue à Féchy, Gilles Wannaz, vigneron-œnologue à Chenaux, José Vouillamoz, généticien de la vigne à Conthey et quelques autres. Tous se sont dévoués corps et âme, souvent sur place, pour le succès de l’entreprise.

Un vin « Révélation »
Aujourd’hui le vignoble vit et prospère sur l’île où, selon la tradition, Saint Jean écrivit le Livre de l’Apocalypse  (le mot veut dire « Révélation » en grec). Le vignoble occupe une superficie totale de deux hectares et son encépagement est constitué à 2/3 de cépages blancs et 1/3 de cépages rouges. Ces cépages sont tous autochtones, en priorité le cépage blanc Assyrtiko. Si l’on en croit ses promoteurs, le blanc Patoinos (nom issu de Patmos et de « oinos » qui veut dire vin en grec) offre « une bouche ample avec beaucoup de volume et de gras, laissant émerger de subtiles notes minérales, mais aussi d’amandes grillées et d’agrumes ».

« Pour la Pâques orthodoxe, au mois d’avril, j’aurais voulu être à Patmos, pour la mise en bouteille de la dernière vendange, la quatrième depuis que nous existons », nous dit Josef Zisyadis avec une note de regret dans la voix. « Je me conforme au confinement, ici en Suisse. Mais en Grèce, nous comptons, cette année, sur 6 à 7000 bouteilles. Un millier ira à ceux qui ont acheté un cep, la plupart en Suisse. Une grande partie des autres sera vendu sur place. » Peut-on s’en procurer ici, en Suisse ? Hésitation…: « Difficile ! Mais, après le confinement, on pourra le déguster au Lyric et au Palace, à Lausanne et aussi à l’Auberge du Raisin, à Cully. Ailleurs encore… » 

D’autres projets liés au vin et aux saveurs ? Rires : « Oui, tout plein ! » 

www.patoinos.ch

Georges Pop