Stop à l’arnaque de l’Ilôt de cherté

La conférence de presse annuelle de GastroSuisse s’est tenue à Berne, la semaine passée. L’organisation patronale suisse de l’industrie hôtelière et gastronomique parie sur l’avenir d’une branche en mutation.

Le président de GastroSuisse Casimir Platzer supervise pas moins de 29’000 entreprises de l’hôtellerie-restauration, occupant 200’000 personnes et formant plus de 8000 apprentis. 20’000 d’entre elles sont affiliées à GastroSuisse. Selon Casimir Platzer, il est de plus en plus important de se faire représenter et de bien se défendre. Premier danger: le tourisme de restauration par-delà la frontière. Les restaurateurs helvétiques y perdent environ 4 milliards de francs de recettes par an. Or selon une étude conduite par le responsable Politique économique de GastroSuisse Sascha Schwarzkopf, les dépenses repas et boissons en Suisse ont totalisé 19,7 milliards de francs, en 2016 (19,4 milliards en 2015). Proportionnellement, la perte est donc extrêmement importante. 

Liste de cherté
Comment faire pour lutter? «Revaloriser la place suisse serait une solution», explique Casimir Platzer. «Il y a une demi-année, nous avions lancé l’initiative «Stop à l’îlot de cherté – pour des prix équitables», en collaboration avec des partenaires d’alliance forts». Son but principal est de réduire le tourisme du shopping et d’empêcher les majorations suisses abusives de la part d’entreprises puissantes sur le marché. 

«Comparez les prix d’un shampoing, d’un pull ou d’un kleenex de marques internationales à Kreuzlingen et à Constance ou à Bâle et à Weil am Rhein. Nous voyons ici que les consommateurs suisses sont arnaqués. La même chose se produit pour nos entreprises de l’hôtellerie-restauration lorsqu’elles doivent par exemple obtenir des biens d’investissements, comme des lave-vaisselles, des installations de cuisine ou du mobilier, qui sont produits à l’étranger et vendus ici via un établissement pratiquant l’onéreuse majoration suisse». La voie est toute trouvée, selon le président de GastroSuisse: si l’initiative passe, on ne demandera pas aux commerçants de baisser leurs prix. On demandera à l’Etat l’autorisation de se fournir à un tarif raisonnable hors frontière, majoré des taxes de douanes. Le tarif sera de toutes façons bien inférieur aux prix des reventes en Suisse.  

De la folie!
Deuxièmement, le président de GastroSuisse enjoint ses concitoyens à refuser la loi sur l’énergie, le 21 mai prochain: «les conséquences seront catastrophiques pour la sécurité de l’approvisionnement. Que nous nous mettions nous-mêmes dans un tel pétrin dépasse l’entendement». Il encourageait les coopérations entre les petites structures hôtelières et touristiques. Il faudrait, selon lui, «des concepts englobant des destinations entières, selon le modèle américain, ou dans le genre de la réalisation de Reto Gurtner à Laax». Mais ça reste de la musique d’avenir.

«En ce qui concerne les commandes en ligne, les mets à l’emporter ou à livrer et les réseaux sociaux, les restaurateurs et les hôteliers devront s’y mettre», a averti le directeur de GastroSuisse Daniel Borner. L’association patronale s’attelle à leur aplanir la voie, même si les collaborations avec des géants comme Booking ou TripAdvisor semblent inévitables. Un rayon de lumière vient éclairer ce paysage quelque peu désolé. La mode de la patrie, des appellations d’origine et de l’artisanat local gagne en effet du terrain. «Pour les restaurateurs et les hôteliers, c’est une chance», conclut le président de GastroSuisse. «Car pour nos clients, les plats frais et faits maison figurent clairement tout en haut de l’échelle de popularité».

Pascal Claivaz