Conférence annuelle de GastroSuisse à Berne

C’est le 27 avril dernier que se tenait la conférence annuelle de GastroSuisse à Berne. Consommation hors foyer en baisse, moins de nuitées des clients européens, conséquences lourdes de la force du franc: les défis que doit relever la branche sont plus importants que jamais.

Casimir Platzer, président de GastroSuisse, a souhaité la bienvenue, à l’hôtel Schweizerhof de Berne, rappelant à l’assemblée que 2016 marque le jubilé de GastroSuisse, qui défend depuis 125 ans les intérêts de l’hôtellerie-restauration. «Les conséquences du franc fort donnent aujourd’hui, une année après l’abandon du taux plancher, du fil à retordre à l’hôtellerie-restauration», explique d’emblée Casimir Platzer. La situation reste toujours tendue dans de nombreux secteurs de la branche, et notamment dans les régions de montagne et rurales. Des distorsions de la concurrence, une pression énorme sur les coûts, ainsi que le souci de trouver la main d’œuvre indispensable, sur un marché soumis à de constantes modifications, aggravent encore la situation. 

GastroSuisse réclame un sommet du tourisme
La situation initiale est complexe et désormais, des vallées entières sont menacées d’exode rural ou de dépeuplement. «Lorsque la demande en provenance de certains pays s’effondre dans les régions de montagne de 40%, des pans entiers de l’économie, qui dépendent du tourisme, sont touchés par cette évolution» explique Casimir Platzer. C’est pourquoi le président de GastroSuisse exige avec force la convocation d’un sommet pour le soutien du tourisme dans l’espace alpin. 
Premier défi: pression des coûts et compétitivité
La Suisse reste un îlot de cherté. Dans la comparaison européenne, elle se place en première position, dans le coût horaire du travail, qui constitue une part importante des coûts de production pour les biens et les prestations de services. Il s’agit ici de préserver la compétitivité de la place économique suisse, pour le maintien des emplois. Dans l’hôtellerie-restauration, les coûts de main-d’œuvre et de marchandises représentent en effet 80% des frais généraux; c’est pourquoi il faut s’attaquer aux coûts des marchandises. GastroSuisse travaille ainsi avec de puissants partenaires d’alliance pour lancer une initiative populaire sous le slogan «Stop à l’îlot de cherté-pour des prix équitables».

Deuxième défi: stopper la surréglementation
Par ailleurs, GastroSuisse lutte également contre une bureaucratie et une surréglementation (notamment le «projet Largo» de l’OSAV) lourde et inutile, qui constitue une vraie charge pour les PME «La densité des réglementations porte atteinte à la compétitivité et freine la croissance (…). Il reste ainsi de moins en moins de temps au restaurateur pour sa véritable vocation, à savoir accueillir le client», souligne Ernst Bachmann, vice-président de GastroSuisse et président de GastroZurich. Il plaide également pour une plus grande marge de manœuvre laissée à l’entreprise. 

Troisième défi: le marché du travail 
Casimir Platzer est ensuite revenu sur le débat de la mise en œuvre de l’initiative contre l’immigration de masse, déplorant que les besoins de l’hôtellerie-restauration n’aient pas été pris en compte par le Conseil fédéral. 
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Seules les autorisations de séjour de courte durée jusqu’à quatre mois sont exclues du contingentement, ce qui ne convient pas aux nombreux établissements de l’hôtellerie-restauration saisonniers. GastroSuisse demande la libre-circulation des personnes dans l’UE, seul moyen pour trouver suffisamment de collaborateurs pour les quelque 29 000 établissements du secteur.

Quatrième défi: le tourisme en mutation
Casimir Platzer a évoqué ensuite le défi le plus important, la mutation du tourisme. En effet, le tourisme connaît en Suisse de douloureuses transformations (taux de change, prix élevés etc.), et les clients se font rares: les nuitées des clients allemands ont chuté de 40% depuis la crise financière de 2008. Les zones montagneuses affichent de fortes baisses, alors que les zones urbaines s’en sortent bien. La demande des clients européens a dans l’ensemble reculé de 22% ces dix dernières années (moins 5% à Genève, moins 37% dans les Grisons, moins 36% dans le Valais…). Cette évolution affecte les branches en amont et en aval (fournisseurs, du négociant de boissons au boucher, en passant par le paysan).

Qualification et innovation
Gilles Meystre, Président de GastroVaud et membre du conseil de GastroSuisse, est ensuite intervenu sur l’évolution du marché et des habitudes de vie. Food trucks, restauration rapide et take aways se sont désormais répandus; ces nouvelles formules, en progression certaine, touchent une population de plus en plus vaste (hausse de fréquentation de 44% à 76%, surtout chez les 30-49 ans et les plus de 50 ans), alors que la restauration traditionnelle subit une perte de fréquentation de 5% à 9%, toute tranche d’âge confondue.» En faveur d’une concurrence saine sur ce marché dynamique, des conditions égales sont une condition de base», affirme Gilles Meystre, insistant sur le renforcement de la formation (hygiène, alcool, droit du travail). Il a ensuite passé la parole à Massimo Suter, Président de GastroTicino, qui a notamment  développé les conséquences lourdes sur le Tessin du tourisme de restauration et des achats (moins 12% de clients suisses, moins 50% de clients allemands); il a également évoqué l’initiative «Ticino a tavola», qui cherche à promouvoir les produits locaux, la qualité et induire ainsi à nouveau une fidélisation de la clientèle.

Nathalie Brignoli